Les rêves prennent leur source au Mont Gerbier de Jonc...

Publié le par Fée tes valises :D

Les rêves prennent leur source au Mont Gerbier de Jonc...

Ce Weekend, on est parti en expédition. On a traversé un bout de France pour rendre hommage au Son, improbable périple en camtar jusqu'aux confins de l'Ardèche profonde. On avait rendez-vous avec les vieux de la vieille, ceux avec qui l'on vibre nécessairement à l'unisson. On l'avait senti de loin cette appel ondulaire, on savait que c'était là qu'il fallait aller, quand bien même on aurait la moitié de la France à traverser, seulement pour participer à une soirée.

Alors on s'est décidé, on a préparé le camion pour faire cette petite virée. A manger, à boire, le plein d'eau, des couvertures, des rechanges et hop...nous voilà embarqués à trois pour des heures d'intrépides aventures en sillonnant les routes du sud.

On a embarqué à 15h30 et comme je suis la seule à conduire cet engin, je me suis assise au volant. Le camion a une vitesse de croisière bien en dessous des limitations autorisées, même pied au plancher. On savait que ça allait nous prendre un temps infini pour venir à bout de la montée qui nous attendait lorsque nous partirions à l'assaut des hauteurs de l'Ardèche. On savait qu'avec le nombre d'arrêts qui nous seraient nécessaires il nous fallait prévoir au moins deux heures de plus. Nous comptions donc arriver sur place aux alentour de 21h30... un repas chaud dans le ventre, prêts à de suite démarrer la fête du bon pied. C'était sa,s compter les mésaventures qui allaient se succéder.

Nous devions impérativement nous arrêter faire du gasoil, pas tant que la cuve soit vide, mais le fait qu'elle soit vieille et remplie de dépôt nous imposent de ne jamais tomber en dessous du quart du plein du réservoir. Nous nous apprêtions à nous arrêter à la prochaine station, lorsque j'ai senti une forte odeur d'essence et lorsque je regardais dans le rétroviseur pour voir si je fumais, j'ai eu l'impression que les vitres arrières étaient constellées de projections bizarres, mais je me dis que je n'avais pas du faire attention au fait que celles-ci devaient déjà être sales. L'odeur d'essence s'intensifiait pourtant, en même temps que mes vitres paraissaient s'opacifier. On a tous pensé qu'il valait mieux s'arrêter pour vérifier. Nous descendons tous les trois, j'ouvre le capot pour que les gars regardent pendant que je contourne le camion pour voir les vitres arrières. Grasses et suintantes, comme je m'en doutais. Les gars ont constaté une sacrée fuite de gasoil, qui coulait à grands flots avant que nous ne coupions le contact. Mince, la pompe à gasoil qui est morte? Difficile de cerner rapidement le problème, on est des nouveaux venus dans le monde de la débrouille sur la route! On pense d'emblée que ça va être compliqué de réparer comme ça, sans réellement trop d'outils et cette gigantesque flaque de carburant répandue sous le véhicule. On pense déjà à devoir appeler un dépanneur, ou Alex, un pote qui s'y connaît. Mais il et loin, ça va prendre des heures, et de toute façon, il est injoignable, même pour un téléconseil avisé. Le temps qu'on cherche un plan B, lorsque je penche la tête sous le capot soulevé et que je vois un câble débranché. La durite a lâché, elle pend dans le vide, laissant s'écouler le liquide. C'est pas Alex, ni le dépanneur qu'il faut appeler, il faut rapidement se souvenir qu'en chacun de nous sommeille un Mac Guyver! Un couteau suisse, un bout de fer, pendant que l'un rafistole, l'autre nettoie les vitres arrières. La réparation de fortune nous permet de continuer plus loin, jusqu'au ravitaillement désormais indispensable en carburant et dans les conditions de consolider correctement la réparation.

Nous voilà bravement repartis vers les nouveaux horizons promis pour la nuit. Le camion roule bien, bien mieux même que je ne le supposais lors de mes précédentes escapades le volant dans les mains. Il grimpe à vive allure relativement à celle qu'il avait pris l'habitude de nous promettre. Ardèche, nous voilà! Après s'être arrêtés un bon moment pour se faire cuire une assiette de pâtes, on a terminé notre voyage vers les hauteurs de nuit... il ne nous restait qu'une trentaine de kilomètres à faire quand soudain, les phares ont rendu l'âme, nous laissant deviner la route dans l'obscurité la plus totale. Arrêt forcé pour tenter de "voir" comment réparer. Un paquet de kleenex pour bloquer la manette en bon Mac Guyver et on a pu continuer tant bien que mal la fin du voyage! Peu à peu nous remontons vers la source de la Loire, à la recherche de notre fameuse soirée, dont l'info line nous a livrés le plan d'accès. A travers les nombreux grésillements de la boîte vocale, j'ai réussi à griffonner à la hâte les principales intersections. Nous grimpons sans savoir réellement où nous allons en nous enfonçant sur des routes toujours plus étroites...

On a fini par rejoindre la soirée en s'étant plusieurs fois enfoncés sur un chemin sans issue duquel il a fallu ressortir en manœuvrant à l'aveugle mon camion de trois tonnes et demi sans direction assistée. Nous garons le véhicule sur le grand parking bitumé avant de tailler la bavette avec Vince, le "placier". Pas la peine de trop s'équiper, on pourra librement circuler, revenir au camion à loisir lors de va et vient sans contrôle. Une soirée à l'ancienne, comme on nous a dit. On aurait pu aller à l'Insane, la grosse soirée prévue le même soir au parc des expo d'Avignon, le plateau promettait d'être alléchant! Mais les vibes qui se dégageaient de la soirée ardéchoise, organisée par les anciens, nous avaient convaincus et bien que ce soit pour nous beaucoup plus loin, on avait décidé de braver les distances, et d'aller danser vers le Mont Gerbier de Jonc.

Effectivement on était sans doute tous nés pour Raver... en tout cas, ceux d'entre nous qui étions là ce soir, réunis à cette soirée. Et raver rime naturellement avec simplicité. Une salle, un bar, des dj's et des gens souriants, pour la plupart prêts à sympathiser. On s'est d'emblée senti comme à la maison, l'ambiance, le son, les gens tout était évident. Pas de barrage, pas de sécu, la liberté absolue, sans débordement. L'autogestion responsable, on est grand, ça fait bien longtemps que nous n'avons plus besoin de chaperon. A l'intérieur, 2 salles, un son old school, un son tribe: les origines du son! Et de la old scholl qui frappe, qui ne laisse personne se trémousser dans son coin, pour qu'on se jette à corps perdu dans la danse, nous tous qui vénérons le Son. Les dj's dont simples et efficaces: pas besoin de grands noms. Des mecs et des nénettes qui partagent avec nous généreusement leur façon de ressentir la musique devant une foule qui les remercie en dansant. Des retrouvailles et des nouvelles rencontres, des gens sympas tout simplement. Même la crêpe à la crème de marron que j'ai mangé vers trois heures du matin était succulente, on sentait qu'elle avait été préparée avec l'amour magique d'une bande de joyeux drilles, prêts à répondre savoureusement aux désirs festifs de nos papilles.

On avait prévu de rester assez tard, mais le temps pluvieux en a décidé autrement. Après un moment de repos au camion au petit matin et une pluie torrentielle qui commençait à infiltrer le camion, nous avons constaté qu'il ne restait plus que quelques véhicules sur le parking. Il était seulement 9h30 et la fête devait durer jusqu'à 15h mais avec ce temps de cochon et le froid consécutif à l'altitude, avait précipité les gens dans leur voiture et enjoint à rentrer plus tôt qu'ils ne l'espéraient. Nous avons du nous résigner à faire de même, vu le temps que nous avions mis à monter jusqu'ici sous un ciel étoilé, nous doutions que la route soit plus rapide qu'à aller. Et nous ne devions pas rentrer trop tard pour récupérer, car dès le lendemain, au moins l'un d'entre nous travaillait. C'est avec regret que nous avons quitté les lieux pour entamer la descente sous une pluie dense, et un brouillard intense. On n'y voyait tout juste à quinze mètres! On a pris une route si étroite, dont le côté droit était jonché d'éboulis, qu'à aucun moment aucun d'entre nous n'a eu l'impression que c'était la même route que la nuit. Une route interminable, à l'aveugle, nous a finalement conduit jusqu'à la nationale, sans encombre, et après une pause pour prendre notre petit déjeuné, kilomètres après kilomètres nous somme parvenus jusqu'à la maison devant laquelle j'ai coupé le contact peu après 15h. Comme à chaque fois, on a poursuivi notre débriefing pendant quelques heures, jusqu'à ce que les garçons rentrent chez eux vaquer à leurs occupations. Pour moi, il était temps de prendre la douche, de laver mon épaisse, longue et inséchable chevelure et d'aller m'endormir épuisée, des rêves plein la tête.

C'est vrai que c'est un sacré périple juste pour aller danser quelques heures, mais si ça ne valait pas la peine, vous pensez vraiment que je l'aurais fait? Parcourir près de 300km, alors qu'il y avait au moins une soirée bien plus près? J'avais l'espoir de retrouver là bas toutes les valeurs profondes qui nous ont tous fait prendre part sans concession au début du mouvement, j'avais espoir que, vingt ans plus tard, ce qui avait initialement fait vibrer nos cœurs soit resté intact. Le milieu a tellement changé au cours de ces années, on l'a tellement conspué, récupéré qu'aujourd'hui, les anciens, on se sent malmené, et le son n'est hélas pas toujours respecté. Cette soirée ainsi organisée nous a bien montrés que nos valeurs initiales sont les maîtres mots d'une soirée réussie. La fête libre que nous avons vécue dans le nuit de samedi à dimanche nous laisse reprendre l'espoir qu'un renouveau est possible, un renouveau de la fête comme nous la faisions au départ. Tous ensemble nous avons pu rendre la vie à la Teuf qui s'essouffle, et nous espérons tous que cette vie puisse durer et se répandre tout autour. L'esprit des premières soirées n'est pas mort, mais il a dormi bien trop longtemps dans nos cœurs comme un magnifique souvenir. Il est temps qu'il se réveille, comme il l'a fait ce weekend, sous la forme d'un rêve, qui prend sa source au Mont Gerbier de Jonc. Et demain, comme la Loire, il coulera à flot vers d'autres horizons...

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