Et la montgolfière s’élève ... toujours plus haut

Publié le par Fée tes valises :D

Et la montgolfière s’élève ... toujours plus haut

Il y avait encore quelques gros sacs de sable accrochés à la nacelle. Ils étaient en réalité si gros que je ne les voyais pas. Ils faisaient tant partie intégrante de mon paysage tellement leur présence était naturelle. Et il fallait que je m’étonne que le ballon ne s’élève pas!

Je n'ai jamais désespéré de parvenir à me libérer de l’emprise de ce lest si pesant, des chaînes qui me retiennent de m’envoler vers le ciel. Je rêve que je serais enfin légère et libre de ne plus avoir peur de prendre de la hauteur.

Le ciel, l'espace, le cosmos m'appellent. Comme l'écho de la montagne appelait la chèvre de monsieur Seguin,la précipitant ainsi à terme dans la gueule du loup. C'est sûrement du fait de mon inconscience que je ne cède pas à la peur, ou avec raison au contraire, parce que je sais bien que des loups il n'y a rien à craindre, les êtres les plus dangereux sont définitivement bien les humains ! Et même s'ils peuvent aller en fusée par delà les nuages, leur étroitesse d'esprit ne nous sert plus à rien.

C'est pour ça que je préfère voyager vers les hauteurs dans une montgolfière, ça laisse au moins le temps d'admirer le paysage, de prendre le temps de profiter du voyage vers ces autres horizons... Prendre son temps : le luxe du présent! C'est comme ça que je choisie de m'envoler vers le futur. Je sais que ce n'est pas forcément le chemin le plus direct, mais en tout cas, même par des sentiers détournés, j'arriverais à bon port. Un port spatio-temporel, un vortex multidimensionnel, ça ne peut être que par là que je rejoindrais mon univers. Mais pour le moment, je patiente. J'observe avec attention.

Et là, alors que je croyais m'être débarrassée de toutes les valises qui lestaient mon véhicule, l'empêchant de s'élever aussi haut qu'il le pourrait dans les airs, j'ai bien été obligée de me rendre à l'évidence que mon élévation n'était pas si évidente. Il y avait encore des résistances à ce que je puisse prendre la hauteur nécessaire à voir enfin la direction de mon port. Il est encore bien trop loin... l'heure n'est pas encore venue de pouvoir redescendre!

Il est normal que je n'ai pas pu voir les énormes sacs de sables sous la nacelle, ils en constituaient la base même, solidement arnachés pour être ne pas bouger, malgré les secousses, malgré la violence des courants d'air. A priori, ils en assuraient la stabilité, tout en conférant une bien moindre mobilité. Et maintenant que je les avais remarqués, je n'avais de cesse que de tenter de m'en débarrasser. Quelle drôle d'affaire! Heureusement que je n'ai jamais été victime de vertige. Ça aurait été abyssal.

Si on avait pu voler comme les oiseaux, planer dans le ciel, libres comme l'air, sans montgolfière, sans nacelle, à se mouvoir par soi même dans les nuages cotonneux, caresser leur voile vaporeux et contempler l'immensité de l'espace... Mais nos ailes ne se déploient plus, gloussants volatiles que nous sommes devenus, elles sont ankylosées depuis qu'on ne les entraine plus à essayer de s'affranchir des frontières de notre confortable et douillet poulailler protecteur. On sait qu'on peut rentrer au bercail pour la nuit, à l'inverse des oiseaux de nuit!

Maintenant, il me faut passer à l'action, terminé la contemplation. C'est bien joli de faire confiance aux lois physiques mais si dès la base on pose de mauvais principes, on fausse toute la compréhension de la structure... maintenant que je sais qu'il existe ces gros sacs, je ne peux plus les ignorer. Je comprends ce qui m'empêche de m'élever. il me faut seulement trouver comment parvenir à les décrocher! Est-ce que je dispose des outils appropriés? Et dans l'immédiat, il me faut me dépêcher, il m'est impossible de me résigner à rester ici, en lévitation entre ces deux horizons, alors même que j'ai conscience de ce qui me retient. Peut-être que si je me penche dans le vide, suspendue à la nacelle de la montgolfière par les pieds, j'arriverais à dénouer les solides liens qui maintiennent ces sacs attachés? Heureusement que je n'ai pas réellement le vertige, les hauteurs ne me font pas peur. Pour autant, ce n'est pas facile, pour autant, j'ai encore peur d'agir, de réussir à me libérer et de m'envoler, pour de vrai... Parce que sans lest, qu'est-ce qui pourra encore me retenir de me diluer dans l'infini, de me laisser aspirer vers une autre réalité?

J'ai vraiment envie de m'affranchir de ce qui me limite, mais ensuite? Est-qu'il me sera possible de conserver la maîtrise de mon "navire"? Une montgolfière n'est pas prévue pour s'élever à l'infini dans le ciel, possible que la solitude éternelle me pèse et que je finisse par avoir besoin des miens, de leur soutien en quittant pour de bon la terre ferme. Toujours plus haut? Il y a quelqu'un pour me tendre la main lorsque je doute, que je peine à me frayer un chemin vers le point de mire de plus élevé que j'aperçois parfois au loin?

Nous sommes chacun dans notre nacelle, les sacs sont plus ou moins lourds, plus ou moins encombrants. Ils existent pour chacun d'entre nous et nous empêchent d'atteindre notre propre hauteur. Une vision plus claire, qui provienne de nous mêmes et non de ce qu'on y a mis à notre insu. Si on ne peut pas s'en débarrasser, tôt ou tard, la nacelle cessera de voler. Elle ira s'écraser au beau milieu du désert, loin de la moindre oasis et il faudra cheminer pour l'éternité dans les dunes de tous nos regrets. Je préfère m'envoler!

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